Édition 2007

HUANG RUI

Exposition fermée depuis le 16 septembre 2007
L’œuvre de Huang Rui est guidée par une conscience aiguë du monde politique qui l’entoure et par une mise en pratique esthétique rigoureuse de son engagement social qui ne trouve pas beaucoup d’autres équivalents dans le monde de l’art contemporain en Chine. La plus grande force de son travail est de parvenir à transformer visuellement les codes qui régissent la société dans laquelle il s’engage, et de le faire depuis 30 ans à travers toutes les formes artistiques qu’il pratique : la peinture, la photographie, l’installation, la performance. L’exposition qui lui est consacrée montre une série de sérigraphies intitulée Chai-na / China, un de ses tra­vaux ma­jeurs, qui est présenté au public pour la première fois. Le travail commence en 2001, quand Huang Rui rentre du Japon pour s’installer définitivement à Pékin. Il ne cesse de prendre en photo une ville qu’il redécouvre en plein bouleversement urbain. Des barres d’immeubles surgissent de la ville grise en ruine où, sur tous les murs, est écrit le caractère « chai » qui signifie « démolir ». Les démolitions des hutongs (vieilles rues) ne modifient pas seulement la physionomie de Pékin, elles bouleversent au plus profond ses tissus sociaux depuis la cellule familiale éclatée aux arrivées massives de travailleurs migrants. En 2003, Huang Rui commence la série proprement dite et la termine au printemps 2007 – sept sérigraphies peintes de triptyques qui se réfèrent aux sept couleurs de l’arc-en-ciel divisées en trois tonalités, soit un total de 21 pièces. Sur les grandes toiles, Huang Rui invente un slogan (qui est depuis souvent repris un peu partout en Chine) en rapprochant le mot anglais « China » aux caractères « chai-na », littéralement « démolition-ici » qui ont la même prononciation en chinois. L’autre moitié de la toile est occupée par les photos prises à Pékin depuis 2001. Quelques photos au hasard : une porte rouge tapissée d’étiquettes de déménageurs, un chantier en construction, une maison à cour carrée en démolition, une fillette souriante, deux travailleurs migrants aux abords de la gare centrale de Pékin… Huang Rui se concentre ici sur deux thèmes qui sont essentiels à son travail : le texte-slogan et la mémoire. Ses jeux de textes nous incitent à penser sur la façon dont nous digérons le passé et dont nous construisons le présent. Il ne joue pas ici seulement sur un jeu de mots et de sens, il s’attache à raviver la conscience de chacun face à son patrimoine culturel qui s’effrite (chai) au nom de la modernité de la nouvelle Chine (China). Même si de-ci de-là surgit un côté dramatique, il n’est pas question de simple nostalgie mais plutôt d’un travail qui parle de mémoire pour mieux parler d’avenir.
Bérénice Angremy
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