Édition 2009

présenté par ARNAUD CLAASS

DON MCNEILL HEALY

De tous les travaux qu’il m’a été donné de voir ces dernières années, celui de Don Healy m’apparaît de loin comme l’un des plus puissants. Je l’ai découvert au printemps 2007 à l’Institute of Arts, Design and Technology
de Dublin, où j’enseigne régulièrement. Don s’apprêtait à présenter ses images au jury de fin d’études, qui a reconnu son niveau particulièrement brillant. Sa série Pigeon House Road montrait déjà des qualités rares. Elle a pour sujet un groupe de Gens du Voyage «installé» dans un faubourg de Dublin, où il affronte, outre l’ostracisme habituel, une situation familiale particulièrement dramatique. Ces images ont été remarquées lors de séminaires critiques au Fotomuseum de Winterthur puis dans des festivals, en Lituanie et à Amsterdam. Avec la série Marko Polo, Don Healy s’intéresse à présent à la situation des sans-abri polonais en Irlande, toujours plus nombreux depuis le déclenchement de la crise économique. Sur les centaines de milliers de personnes venues d’Europe de l’Est lors de l’economic boom, une proportion alarmante se trouve aujourd’hui dans un état de grande précarité. Le travail photographique présenté ici se concentre plus particulièrement sur un jeune homme, Marko, sans que l’histoire s’en trouve indexée sur une identification sentimentale de la part du spectateur. Il est à mon sens urgent de donner toutes ses chances à un photographe comme Don Healy, qui possède un si juste sens de la distance, dans tous les sens du terme. Il nous rappelle avec un brio remarquable à quel point, en nos temps de (passionnants) défis technologiques, les valeurs poignantes du témoignage le plus attentif nous sont nécessaires.
 Arnaud Claass
 
MARKO POLO (2008). En 2004, la Pologne devient membre de l’Union Européenne, donnant ainsi aux Polonais le droit de quitter le pays, pour chercher un travail mieux rémunéré et recommencer de zéro. Près de 200 000 d’entre eux se sont rendus en Irlande, influençant cette société de plus en plus multiculturelle, avec des journaux et des commerces polonais. Le ralentissement économique en 2008 en Irlande et dans le monde, voit nombre de Polonais sans emploi retourner dans leur pays encore en développement. Mais beaucoup d’autres restent en Irlande dans l’espoir de trouver un travail et une vie meilleure, même si certains sont à la rue. Marko, 35 ans, est un de ces sans-abri vivant à Dublin. Originaire de Gdansk, il est divorcé et a deux enfants. Il est arrivé à Dublin en 2006 et a trouvé du travail sur un chantier. Après avoir perdu son emploi en 2007, il est resté en Irlande à chercher du travail malgré sa situation précaire. En 2007, Marko a commencé à squatter une usine désaffectée à Dublin avec d’autres sans-abri polonais, et y reste plus d’un an. Il n’y a pas d’électricité et les seules sources d’eau sont les toilettes et la pluie. En vivant dans ce domicile temporaire, Marko cherche du travail. Malheureusement, à cause de son problème d’alcoolisme et de son incapacité à prendre sa situation au sérieux, il n’a pas trouvé d’emploi, et passe la plupart de ses journées à boire avec d’autres Polonais, dans les rues ou dans le squat. En octobre 2008, le squat est fermé et Marko vit depuis chez des amis, sous les escaliers d’un immeuble de bureaux ou dans un parking. En mars 2009, Marko a rejoint une nouvelle église chrétienne à Dublin qui propose un programme de désintoxication. Il espère entreprendre un programme sur seize mois pour remettre de l’ordre dans sa vie.
 
96 PIGEON HOUSE ROAD(2005-2007). Les Travellers sont une minorité ethnique originaire de l’Irlande, nomade et possédant des traditions culturelles qui leur sont propres. Ils se déplacent en caravane, s’arrêtant sur des aires officielles ou non, y compris sur le bord de la route.
Les Travellers se marient jeunes, souvent à 16 ans (la majorité matrimoniale en Irlande), ont beaucoup d’enfants et des liens familiaux très forts. Les Travellers sont souvent victimes de discrimination liée à leur mode de vie nomade, d’un manque de respect vis-à-vis de leur culture de la part de la société et, dans certains cas, pour leurs activités illégales. Mais le plus souvent, c’est de l’ignorance générale dont souffrent les Travellers.
À partir de décembre 2005, j’ai passé un an et demi à photographier la vie des Maughan, une famille qui réside dans une zone industrielle le long de Pigeon House Road à Dublin. Cette famille vit dans une situation difficile. Rosie est divorcée avec 13 enfants et s’occupe des deux filles qui vivent encore avec elle, ainsi que de nombreux petits enfants qui lui sont souvent confiés. L’alcoolisme de Rosie, la réticence des filles à aller à l’école et le tas de détritus qui grossit à côté de leur caravane rendent la vie pénible. Cependant, l’humanité présente chez Rosie et sa famille ainsi que leur force d’esprit leur permettent de surmonter le chaos qu’elles vivent.
 Don McNeill Healy

Tirages réalisés par DUPON Digital Lab.
Encadrements réalisés par Jean-Pierre Gapihan

  • Partenaires institutionnels

    • République Française
    • Région Provence Alpes Côté d'Azur
    • Département des Bouches du Rhône
    • Arles
    • Le Centre des monuments nationaux est heureux de soutenir les Rencontres de la Photographie d’Arles en accueillant des expositions dans l’abbaye de Montmajour
  • Grands partenaires

    • Fondation LUMA
    • BMW
    • SNCF
    • Kering
  • Partenaires médias

    • Arte
    • Lci
    • Konbini
    • Le Point
    • Madame Figaro
    • France Culture