Édition 2016
Avignon, Collection Lambert
Andres Serrano
Torture
Ayant bénéficié d’un accès privilégié à certains sites et à des individus normalement inaccessibles, Andres Serrano, dans sa récente série, Torture, propose une sorte de cabinet de curiosités retraçant l’évolution des techniques de torture punitives et coercitives depuis les jours anciens jusqu’à leurs manifestations les plus contemporaines. La juxtaposition d’images d’authentiques outils de torture appartenant à des collections muséales réputées avec des répliques empruntées aux musées les plus kitsch consacrés à la torture interroge tout autant la théâtralité de ce supplice que la question de sa commercialisation. Des portraits d’individus victimes de tortures psychologiques et physiques côtoient ceux de lanceurs d’alerte, tandis que l’intrication complexe des culpabilitiés et des complicités sème encore un peu plus la confusion entre obligations et responsabilités. Cette ambiguïté est accentuée grâce à la reconstitution à grande échelle de certaines méthodes de torture dans lesquelles ont été photographiés dans des positions dégradantes des modèles consentants, au point d’entraîner une véritable détresse physique chez ces derniers. Visibles pour la première fois côte à côte, on ne peut qu’être frappé par les fortes similitudes existant entre les prisons, les cellules d’interrogatoires, les camps de la mort et les centres de rétention, des visions qui nous confrontent à la nature cyclique de l’histoire. L’artiste est ainsi devenu bourreau et nous spectateurs, chacun participant de part et d’autre à ce complexe réseau de divertissements et de responsabilités.
Exposition et série produites par a/political.
Publication : Torture, éditions de l’Amateur, 2016.